Etoile de Bessèges : “C’était une évidence pour moi”, Pierre Rolland raconte sa nouvelle vie, mais pas que

Jeune retraité, Pierre Rolland (36 ans) fera ses débuts comme consultant télé sur Etoile de Bessèges (du 1er au 5 février). L’occasion de revenir sur sa riche carrière, l’état de la France et du cyclisme mondial.

express bio

10 octobre 1986 à Gien (Loiret)
Équipes : Crédit Agricole (2006-2009), Bouygues Telecom (2009-2010), Europcar (2011-2015), Cannondale (2016-2017), EF Education First (2018), B&B HOTELS (2018-2022).
Prix : meilleur jeune coureur du Tour de France (2011), 8e du Tour de France (2012), 2 étapes du Tour de France (2011, 2012), 1 étape du Tour de France (2017), 4e du Tour de France Italie (2014).

Vous avez dû prendre votre retraite plus tôt que prévu, qu’est-ce qui vous attend en 2023 ?

Ce que j’attends, c’est un changement, une nouvelle vie commence. Ma première mission est de devenir consultant sportif au sein de La Chaîne l’Equipe. C’est quelque chose que je voulais vraiment faire. J’ai été agréablement surpris par l’intérêt rapide de la chaîne, qui m’a contacté près d’une heure après l’annonce de ma suspension de carrière. Je suis content de commencer. Après, j’ai deux autres projets concrets et très avancés mais pour le moment, je ne peux pas en dire plus car ce n’est pas lié à 100%.

Projet sportif ?

C’est du vélo d’aventure professionnel.

Avez-vous déjà imaginé, après votre carrière, rejoindre le staff d’une équipe ou d’une organisation liée au cyclisme ?

Oui. Il y a une transition à faire, il ne faut fermer aucune porte, regarder partout. Mon esprit est ouvert, bouillant dans l’instant, je veux découvrir beaucoup plus de choses. Petit à petit, j’affinerai mon orientation.

Vous espériez prolonger l’aventure à vélo. N’était-ce pas trop difficile de digérer cette décision si rapidement ?

C’est comme ça. Je pourrais encore être cycliste professionnel en 2023 mais j’ai pris ça comme un signe du destin. Heureusement, j’avais fait quelques progrès sur ce que je voulais faire ensuite. Ça donne le coup d’envoi.

Comment avez-vous vécu ces dernières semaines avec B&B ?

Nous connaissons tous la fin tragique, pas jolie du tout. Je tiens à rappeler que j’ai passé quatre très bonnes années avec cette équipe. J’ai rencontré beaucoup de gens très charmants, beaucoup de jeunes cavaliers avec qui je garde un contact très étroit. Je ne commencerai pas à les citer car j’oublierai les mauvais. Je préfère m’en souvenir plutôt qu’une fin un peu catastrophique.

J’ai pris plaisir à repartir à l’Etoile de Bessèges, une course que j’ai fait presque dix fois

Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce rôle de consultant ?

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Déjà, je regarde toutes les courses de vélo. Je suis un grand fan de mon sport. Si mon métier est de faire quelque chose que l’on fait tout le temps à la maison, c’est d’allier travail et plaisir. C’était évident pour moi. Ils m’ont donné ma chance très rapidement. J’ai déjà eu quelques expériences lorsque j’ai été blessé, ou lorsque mon programme me le permettait. J’aime vraiment ça. Je ne vois pas le temps passer, c’est un beau métier et ça me permet de rester dans le milieu que j’aime.

L’étoile Besèges, comment se prépare-t-elle ?

Les courses de récupération sont toujours un point d’interrogation. Bien que l’hiver cycliste soit devenu très court et que les saisons commencent de plus en plus tôt, se terminent de plus en plus tard et que les équipes envoient les coureurs à l’entraînement très rapidement. Il y a toujours un peu d’appréhension. J’ai pris plaisir à repartir à l’Etoile de Bessèges, une course que j’ai fait presque dix fois. Il a un profil varié, exigeant sans être trop exigeant. C’est une bonne course pour redémarrer la voiture. Il s’agit d’un profil de coureur complet.

Depuis vos débuts, avez-vous ressenti l’évolution du cyclisme ?

Bien sûr, comme dans tous les sports. Le plus frappant est l’émergence de coureurs de plus en plus jeunes. Jusqu’à il y a 10-15 ans, le cyclisme était considéré comme un sport mature. Là, un jeune de 19-20 ans peut concourir tout de suite.

Il y a aussi eu une grande évolution du matériel. Il roule vite. La moyenne a considérablement augmenté. Les vélos sont tous très performants et ça relève le niveau.

cyclisme réel

Lors de votre passage d’une équipe française à une équipe étrangère (d’Europcar à Cannondale), avez-vous ressenti une différence de conditions ?

Oui (il s’arrête). Ce que je pense, ce que je vois, c’est qu’une équipe comme Sky a établi des normes plus élevées. Les équipes étrangères ont suivi très rapidement et les équipes françaises ont mis du temps à frapper. Aujourd’hui, ces derniers recherchent des performances telles que Groupama FDJ, AG2R Citroën, Total Energies, etc. Chaque année, ils essaient d’évoluer dans leur approche, leur équipement et leur formation également. La Continentale Groupama est devenue quelque chose de très sérieux. Nous sommes revenus à un haut niveau d’exigence et de performance.

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Peter Sagan a récemment déclaré avoir apprécié le côté humain de son aventure chez Total Energies, éloigné du métier du vélo qu’il a connu ailleurs…

(Il coupe) Peter Sagan a fait une équipe de France. Il y rencontre une équipe et un patron qui est Jean-René Bernaudeau, une personne atypique, très attachée et attachante à ses passagers. Là, si on compare Bernaudeau à Oleg Tinkov (l’ancien patron de l’équipe Tinkoff), il a fait un virage à 180, c’est clair.

Thibaut Pinot a annoncé sa retraite. Êtes-vous surpris?

C’est vrai qu’il est encore très jeune (32 ans). Je ne le connais pas personnellement, donc je ne sais pas comment il se sent tout au long de sa carrière. Mais nous savons que le sport de haut niveau a de nombreuses exigences et contraintes. Et il ne veut plus les porter. C’est mieux ainsi que de traîner sa misère ou de reculer. Le vélo est trop dur pour le faire à 80%.

Voyez-vous un coureur français qui pourrait gagner un Grand Tour aujourd’hui ?

C’est toujours la question. Cela dépend de la concurrence. Si Pogacar, Vingaard et deux ou trois autres décident d’aller au Giro et à la Vuelta plutôt qu’au Tour de France, peut-être y a-t-il une marque à prendre. Physiquement, nous ne sommes pas plus forts. Mais nous savons tous ce qu’est le vélo, les dangers qu’il peut comporter. En 2014, lorsque Nibali a gagné, il était le plus fort. Sauf que Froome, Contador et Quintana se sont cassé la gueule. On ne sait pas ce qui se serait passé s’ils n’étaient pas tombés. Cela signifie que même un gars qui n’est pas le plus fort sur le papier peut gagner. En cyclisme, parfois le plus fort ne gagne pas.

Si Thibaut (Pinot) termine 3e en 24, on se dit qu’en 25-26-27, il peut l’avoir. Un mec comme Romain Bardet qui fait 2e et 3e, la même chose. Si les étoiles sont alignées dans le bon sens, c’est possible. Il y a des gars qui ont l’air très prometteurs (Romain Grégoire, Lenny Martinez) il faut leur laisser le temps d’arriver.

La formation en français est-elle suffisamment efficace aujourd’hui ?

C’est un grand débat. Il y a plusieurs choses à considérer. En France, le sport se place à quel niveau par rapport à certains pays ? Pour moi, c’est la question fondamentale. La question n’est pas : est-ce que Groupama FDJ fait bien son travail ? Je pense que oui. Peut-être que la détection, les études sportives et toutes ces choses ne sont pas beaucoup développées et nous manquons de champions, c’est évident.

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En France, c’est deux heures de sport par semaine, alors que dans certains pays de l’Est, comme la Norvège, on fait du sport tous les jours l’après-midi. Ils n’ont pas du tout la même culture. Aux États-Unis, si vous êtes un sportif de haut niveau, vous avez accès à de belles études. En France, tu fais d’abord tes études puis tu vas à ton sport à 18h si tu as le temps. Je suis sûr que certains mecs avaient un potentiel fou, mais ils se sont dit à un moment donné qu’ils ne pouvaient pas miser sur le sport plutôt que sur les études.

Boîte à souvenirs

Grâce aux fans, “Attaque de Pierre Rolland” est devenue une expression iconique du peloton. Est-ce gratifiant ?

J’ai hâte de voir, maintenant, en tant que consultant, comment ils vont pouvoir le mettre. C’est quelque chose qui s’est fait petit à petit dans le panache et les tentatives (sourire). C’est quelque chose qui me fait rire. J’ai même enregistré la marque.

Quel est ton meilleur moment à vélo ?

Si je dois en choisir une, c’est évidemment l’Alpe d’Huez en 2011. C’était ma première grande victoire dans un Grand Tour. Là, il était sur la Grande Boucle, dans une ascension mythique et devant le champion (Alberto Contador). En gros, je devais m’en tenir à Thomas Voeckler. C’était ma mission. Il a appelé le Télégraphe et le Galibier, et quand on l’a ramené, il m’a dit de partir. Sinon, je n’y vais jamais.

Et ton regret ?

Ils ont raté le maillot à pois en 2013, lors de la dernière journée, au Semnoz. Je l’ai porté presque tout le long, je l’ai perdu dans la dernière ascension. C’est comme rater un penalty dans une finale de coupe.

Qui était votre meilleur ami dans le peloton ?

Cyrille Gauthier. C’était mon garçon d’honneur et c’est le parrain de ma fille.

Quel coureur vous impressionne le plus ?

Dylan VanBaarle. Il a gagné Paris-Roubaix. J’ai toujours dit que c’était vraiment fort. Et puis, après avoir gagné Paris-Roubaix en faisant cinquante kilomètres en solitaire, j’ai reçu des SMS.

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